L'UE décidée à mettre au pas les '’GAFAM’’

L'UE décidée à mettre au pas les '’GAFAM’’
Source : Map
05/04/2022 09:00

Après des années de tergiversations et une succession de mesurettes, l’UE semble cette fois décidée à reprendre le pouvoir sur les fameux ‘’GAFAM’’. De nouvelles règles du jeu très strictes, avec à la clé des sanctions et des amendes très salées, ont été instaurées pour faire cesser les abus, manquements et récidives de Google, Apple, Facebook (Meta), Amazon, Microsoft et autres géants du numérique.

L’accord politique sur ‘’la législation sur les marchés numériques’’ (DMA-Digital Markets Act), conclu il y a quelques jours entre le Parlement européen et le Conseil –qui représente les 27- balise la voie à la perspective d’un secteur numérique ‘’plus équitable et plus compétitif’’.

Le DMA, qui doit encore être ratifié pour entrer en vigueur en janvier 2023, est ‘’une révolution très importante qui va permettre d’agir très vite’’, a commenté le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, qui a avait conçu cette législation avec la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager.

Les réactions enthousiastes des responsables européens montrent à quel point le DMA était attendu comme un bouleversement de l’approche actuelle, un changement de philosophie face aux géants du net. Car, si un moment la méthode des recours aux procédures judiciaires et des amendes a été favorisée, avec des résultats mitigés, c’est désormais l’action en amont qui sera privilégiée. L'Union européenne est d’ailleurs la première à agir de manière aussi tranchée en ce sens.

‘’L'Union européenne a été amenée à prononcer des amendes record ces dix dernières années contre certaines pratiques commerciales néfastes des très grands acteurs du numérique. Le DMA permettra d'interdire directement ces pratiques et créera un espace économique plus équitable et contestable pour les nouveaux acteurs et les entreprises européennes’’, a expliqué Cédric O, secrétaire d'État français chargé du numérique, dont le pays assure la présidence tournante de l’UE.

Ces règles sont, selon lui, décisives pour stimuler et déverrouiller les marchés numériques, renforcer la liberté de choix des consommateurs, permettre un meilleur partage de la valeur dans l'économie numérique et stimuler l'innovation.

Pour le rapporteur de la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs au Parlement européen, Andreas Schwab, ‘’cet accord inaugure une nouvelle ère en matière de règlementation des technologies dans le monde. La législation sur les marchés numériques met fin à la dominance toujours plus grande des grandes entreprises technologiques. Désormais, elles devront démontrer qu’elles permettent l’expression de la libre concurrence sur le net. Les nouvelles règles aideront à renforcer ce principe de base. L’Europe garantit ainsi plus de concurrence, d’innovation et de choix pour les utilisateurs’’.

Une vingtaine au totale, les nouvelles règles visent à s'assurer qu'aucune grande plateforme en ligne qui se trouve dans une position de "contrôleur d'accès" vis‑à‑vis d'un grand nombre d'utilisateurs n'abuse de cette position au détriment des entreprises qui souhaitent accéder à ces utilisateurs.

Le Conseil et le Parlement européen sont tombés d’accord que pour qu'une plateforme soit qualifiée de contrôleur d'accès ("gatekeeper"), elle devait, d'une part, dans les trois dernières années, soit réaliser un chiffre d'affaires annuel d'au moins 7,5 milliards d'euros au sein de l'Union européenne (UE), soit avoir une valorisation boursière d'au moins 75 milliards d'euros, et qu'elle devait compter au moins 45 millions d'utilisateurs finaux mensuels et au moins 10.000 utilisateurs professionnels établis dans l'UE.

Sont ainsi ciblées uniquement les plus grandes plateformes, à savoir les Gafam et d’autres géants comme Booking, Netflix, Airbnb, Uber ou TikTok.

D'autre part, la plateforme doit contrôler un ou plusieurs services de plateforme de base ("core platform services") dans au moins trois États membres. Ces services de plateforme de base comprennent les places de marché et les boutiques d'applications, les moteurs de recherche, les réseaux sociaux, les services en nuage, les services de publicité, les assistants vocaux et les navigateurs web.

Et pour s'assurer que les nouvelles règles soient proportionnées, les PME sont exemptées de la qualification de contrôleur d'accès.

Entre autres règles, les contrôleurs d'accès devront assurer le droit des utilisateurs de se désabonner des services de la plateforme de base dans des conditions similaires à l'abonnement, assurer l'interopérabilité des fonctionnalités de base de leurs services de messagerie instantanée (entre Whatsapp, Signal ou Telegram par exemple), permettre aux développeurs d'applications d'accéder dans des conditions équitables aux fonctionnalités auxiliaires des smartphones (puce NFC, par exemple) et donner aux vendeurs l'accès à leurs données de performance marketing ou publicitaire sur la plateforme.

Pour les logiciels les plus importants (navigateur web, par exemple), les plateformes ne doivent pas imposer ces logiciels par défaut à l'installation du système d'exploitation.

Aussi les plateformes ne pourront-elles plus classer leurs propres produits ou services de manière plus favorable que ceux des autres acteurs du marché (auto‑préférence)-comme c’est le cas avec Google, notamment-, réutiliser les données personnelles collectées lors d'une prestation pour les besoins d'une autre prestation, établir des conditions déloyales pour les utilisateurs professionnels, préinstaller certaines applications logicielles et imposer aux développeurs d'application l'utilisation de certains services (système de paiement ou fournisseur d'identité par exemple) pour être référencés dans les magasins d'application.

Dans le texte proposé par la Commission, les sanctions ont été durcies. L’objectif : amener les géants du numériques à montrer patte blanche, en respectant les règles du jeu.

Si une plateforme enfreint ces règles, il risque une amende pouvant aller jusqu'à 10 % de son chiffre d'affaires (CA) mondial total. En cas de récidive, une amende pouvant aller jusqu'à 20 % du chiffre d'affaires mondial pourra être imposée. A titre indicatif, une éventuelle amende infligée à Facebook (Meta), qui a réalisé un CA de 117 milliards d’euros en 2021, pourrait lui coûter entre 11 et 23 milliards d’euros !

Et dans le cas où un contrôleur d'accès adopte un comportement de non-respect systématique du DMA, c'est‑à‑dire qu'il enfreint les règles au moins 3 fois en 8 ans, la Commission européenne s’accorde le droit d’aller encore plus loin, en ouvrant une enquête de marché et, si nécessaire, en imposant des mesures correctives comportementales ou structurelles. Le stade presque ultime qu’aucun géant du numérique ne souhaiterait s’en approcher, tant son impact économique est très lourd !

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