"L'Pouffa", ou quand le crack devient un fléau au Maroc

Source : SEFIANI Karim
07/02/2024 13:00

En ce début de février, le Think Tank ISS Africa s'est penché sur la question de l'Boufa au Maroc, avec son rapport intitulé « La cocaïne pour les pauvres menace des vies au Maroc ». C'est l'occasion pour nous de nous plonger un peu plus sur cette drogue, ce fléau qui touche notre jeunesse marocaine, mais pas seulement.

Aujourd'hui, nous abordons un sujet préoccupant qui déchire la vie des jeunes au Maroc, une menace qui s'étend insidieusement à tous les secteurs de la société. Aujourd'hui, nous allons parler de drogue, plus précisément du crack, localement connu sous le nom "l'Boufa".
 
Inconnu au bataillon avant 2020, désormais disponible à tous les coins de rue en 2024, au Maroc aujourd'hui, que ce soit de manière rudimentaire dans des bouteilles de plastique vides ou des cannettes de soda, coupé avec des produits hautement nocifs, la consommation de cette substance commence à connaître un attrait tout particulier pour une partie de la population marocaine, parfois la plus défavorisée. D'autres, peut-être plus aisés, la consomment à l'aide d'une pipe à crack. Mais des deux côtés, cette drogue commence à faire des ravages.
 
Les dégâts sont tels que récemment, l'Institut des études de sécurité (Institute For Security Studies - ISS Africa), dans son rapport intitulé "La cocaïne pour les pauvres menace des vies au Maroc", a souligné la nécessité d'une intensification des cadres juridiques et institutionnels ainsi que du développement de programmes sanitaires face à la menace grave que représente la consommation de la drogue appelée "l’Boufa" pour la vie des Marocains.
 
Le think tank a également exprimé sa préoccupation quant à la circulation croissante de la cocaïne dans le pays, facilitant la production et la distribution de "l'Boufa" par les trafiquants et les revendeurs, aggravant ainsi une situation déjà désastreuse.
 
Alors, quels sont ses effets ? Pourquoi est-il si nocif et si dangereux ? Plongée dans les racines de ce fléau et ses conséquences dévastatrices à tous les niveaux.
 
L'Boufa, Quésako ?
 
Le Crack, aussi connu sous le nom de ''Boufa'' au Maroc, est une forme de cocaïne chauffée à la bicarbonate de soude ou à l'ammoniaque, et qui est généralement fumée. En Europe, cette substance y est déjà problématique depuis des décennies.
 
En effet, selon les données de l'Observatoire européen des drogues et de la toxicomanie, la consommation de cocaïne sous forme de crack a augmenté de manière alarmante, touchant des milliers de personnes. En 2021, par exemple, il a été signalé que près de 4% des adultes âgés de 15 à 64 ans en Europe en avaient déjà consommé au moins une fois dans leur vie. Le Maroc ne dispose pas encore de ce genre de statistiques.
 
Pour ses effets, le produit agit en l'espace d'une minute et provoque les mêmes effets que la cocaïne, avec cependant un contrecoup, l'effet qui se dissipe en moins de 15 minutes. Cette sensation de montée et descente abrupte est l'un des facteurs qui crée cette haute dépendance au produit. Ces dernières années, son utilisation a augmenté de manière alarmante au Maroc, touchant particulièrement les jeunes, mais comment en sommes-nous arrivés là ?
 
Pour répondre à cette question, il est essentiel de comprendre les facteurs sous-jacents qui ont favorisé la propagation du crack au Maroc.
 
Les facteurs sous-jacents à la propagation de l'Boufa au Maroc
 
Pour ces facteurs, en premier lieu, nous avons la dépendance au produit. Le Crack est unanimement reconnu pour sa dépendance extrême. Dès les premières prises, il crée un sentiment puissant d'euphorie, suivi d'une descente brutale, incitant les individus à en reprendre pour retrouver cette sensation ''agréable''.
 
Cette boucle destructrice entraîne une dépendance rapide, souvent au détriment de la santé physique et mentale de l'individu, sans parler de sa vie sociale et professionnelle. Et quand cette dépendance est couplée à certains facteurs économiques et sociaux de certaines populations plus vulnérables que les autres, le cocktail en devient mortel, un vrai fléau.
 
L'un des autres facteurs clés de sa propagation pourrait aussi être la vulnérabilité économique de nombreuses communautés au Maroc. Chez certains pans de la population marocaine, le crack se révèle particulièrement dangereux, surtout à cause de l'aspect contaminé de cette substance. Les personnes les plus défavorisées, accros à la substance, consomment la plupart du temps du crack coupé avec toutes sortes de produits hautement nocifs. Ce qui les rend encore plus dangereux.
 
Le chômage, la pauvreté et les inégalités sociales ont donc conduit certaines jeunes à chercher certains échappatoires, et force est de constater que le crack est devenu l'une d'elles.
 
Les alertes du Think tank ISS Africa
 
Du point de vue des statistiques, dans son rapport, le Think tank a souligné qu'au cours de l'année scolaire 2022-2023, les mesures de sécurité déployées dans divers établissements éducatifs au Maroc ont conduit à l'investigation de 3 870 incidents, aboutissant à l'arrestation de 4 286 individus soupçonnés de trafic de "boufa".
 
Entre août et septembre 2023, 112 trafiquants de drogue spécialisés dans le "boufa" ont été appréhendés, et une quantité significative de 1 413 kg de drogue a été saisie lors d'une opération coordonnée englobant plusieurs villes marocaines. Cette action des forces de l'ordre a également conduit au démantèlement de six réseaux criminels de trafic de drogue opérant à l'échelle nationale.
 
En juillet 2023, à Casablanca, 15 individus ont été interpellés en possession d'outils et d'ingrédients destinés à la fabrication de "l'Boufa". En octobre de la même année, les autorités marocaines ont intercepté 1 371 kg de cocaïne entrant illégalement dans le pays depuis l'Espagne.
 
Des chiffres qui ne doivent être que la partie visible de l'iceberg dévastateur qu'est devenu l'Boufa au Maroc.
 
Il serait temps d'y remédier.

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