Catherine 41 ans, rescapée du Bataclan

Pour tenir, Catherine Bertrand s'est accrochée à deux bouées de sauvetage : la psychothérapie et le dessin. « Je suis sortie du Bataclan vivante et pas blessée. » Du moins physiquement. Car très vite, la jeune femme constate qu'elle souffre de stress post-traumatique. « J'ai appelé un numéro d'urgence dès le lendemain car je sentais que ça n'allait pas. On m'a dit d'aller à l'hôpital. Sur le chemin, j'ai fait une première crise d'angoisse sévère en entendant le bruit du marteau-piqueur dans le métro. » À l'arrivée, un médecin lui prescrit des anxiolytiques et des somnifères. Elle se dit que tout cela est temporaire. Qu'avec le temps… « Mais les crises d'angoisse s'accentuent. » Elle contacte l'association Paris Aide aux victimes et commence une thérapie auprès d'une psychologue spécialisée dans le trauma, une heure par semaine. « Ça m'a fait beaucoup de bien. » En 2016, elle expérimente quelques séances d' EMDR, « une méthode très difficile, efficace pour certains, qui vous oblige à revivre les traumatismes ». Cependant, les attentats de Bruxelles, le 22 mars 2016, réduisent à néant ses efforts de reconstruction. « L'hypervigilance, les cauchemars, les insomnies, la culpabilité d'être en vie, les hallucinations auditives… tout s'est réactivé. »

Dessiner pour reprendre le contrôle

En mai 2016, elle cherche un psychiatre pour améliorer son suivi. « Impossible d'en trouver un, même à Paris, tellement il y avait de demandes. J'ai contacté l'hôpital Tenon. Ils m’ont demandé de me justifier pour obtenir une prise en charge, comme s’ils effectuaient un tri entre les plus ou les moins traumatisés. J'ai vécu cela comme un abandon. Le même sentiment d'abandon extrême que celui que j'avais ressenti quand je suis sortie du Bataclan. Et, finalement, c'est parce que j'ai fait une énorme crise d'angoisse sur mon lieu de travail en juin 2016 que j'ai pu obtenir un suivi régulier qui continue encore aujourd'hui. » À l'approche du procès, celle qui est devenue graphiste indépendante a intensifié la fréquence des séances. Une soupape aussi indispensable que le dessin. Elle a publié une bande dessinée* en 2018 pour aider à faire comprendre le syndrome de stress post-traumatique. Dans la salle d'audience où elle s'est rendue plusieurs fois depuis le début du procès, le dessin lui permet de s'ancrer quelque part et de se mettre à l'abri. « Je m'accroche à mon carnet de croquis pour supporter la violence de ce à quoi on assiste. La proximité avec les accusés, respirer le même air qu'eux, leur image même, est une violence. Le dessin aide à se canaliser et à reprendre le contrôle. »

* « Chroniques d'une survivante », de Catherine Bertrand (Éditions de La Martinière).