L’émotion a pris le dessus. Hospitalisé depuis mercredi à l’hôpital militaire de Rabat pour une cirrhose avancée, Mohamed Choubi, visage bien connu du cinéma et de la télévision marocains, a vu une vague de soutien se propager sur les réseaux sociaux.
Acteurs, réalisateurs, figures culturelles : tous ont relayé un appel urgent au don de foie. À l’origine, un message lancé par Amine Ennaji, vite repris par Latifa Ahrar, Fayçal Azizi, Abdeslam Kelai et bien d’autres. L’élan est sincère. L’urgence, palpable. Mais le cadre juridique, lui, reste ignoré.
Ce que dit la loi
Au Maroc, le don d’organes entre vivants est strictement encadré par la loi n° 16.98. Il n’est autorisé qu’entre proches : parents directs, frères, sœurs, conjoints mariés depuis au moins un an, ou certains membres élargis de la famille. En dehors de ces cas, le don n’est possible qu’à titre posthume, sous réserve d’un consentement formel donné de son vivant, devant un président de tribunal.
Autrement dit, les élans de solidarité, aussi puissants soient-ils, se heurtent à un cadre légal rigide. Et ce, pour une raison simple : éviter toute dérive commerciale ou pression sur des donneurs vulnérables.
Un miroir tendu à la société
Cette affaire ne se limite pas à un drame individuel. Elle met en lumière une faille persistante : la méconnaissance du grand public — y compris des figures médiatiques — des lois qui régissent le don d’organes.
En appelant au don dans un cadre illégal, même involontairement, ces voix influentes risquent de créer de faux espoirs, de banaliser un geste profondément encadré ou de fragiliser la confiance dans le système médical.
Le ministère de la Santé ne cesse de le rappeler : la dignité du donneur et la sécurité du receveur passent par le respect du droit, sans exception, ni pression sociale.
Au-delà de l’émotion, ce dossier rappelle l’urgence d’un travail de sensibilisation structuré sur le don d’organes. Une campagne ciblée, claire, accessible. Car il ne s’agit pas seulement de sauver des vies : il s’agit aussi de préserver l’éthique, même dans la détresse.
Mohamed Choubi, lui, reste hospitalisé. Et tout un pays espère. Mais entre espoir et précipitation, le droit reste la seule boussole.