Le Maroc a importé 1.429 tonnes de viande bovine américaine sur les quatre premiers mois de 2025, contre 509 tonnes sur la même période en 2024. En pleine flambée des prix, notamment durant l’Aïd al-Adha, le recours aux importations s’est imposé pour soulager un marché sous pression. Les données publiées par la Fédération américaine des exportations de viande (USMEF) montrent que le Royaume est devenu l’un des principaux débouchés africains des États-Unis, aux côtés du Gabon et de la Côte d’Ivoire.
Ce boom contraste avec la baisse générale des exportations américaines, en recul de 10 % en avril, mais reflète une stratégie de redéploiement ciblé. Faute d’accès fluide au marché chinois, les États-Unis misent sur des circuits alternatifs, notamment en Afrique. Les pièces exportées vers le Maroc sont principalement destinées à l’agroalimentaire, à la transformation industrielle ou à la distribution dans les grandes villes.
Un secteur sous pression
Cette poussée des importations révèle un malaise plus profond. La production nationale est fragilisée par des années de sécheresse, une crise fourragère persistante et une flambée des coûts de production. Le marché local peine à suivre, surtout en période de forte demande. Selon Youssef Karaoui Filali, président du Centre marocain pour la gouvernance et la gestion, l’envolée des prix s’explique par un décalage criant entre l’offre et une demande dopée par les achats massifs de ménages n’effectuant pourtant pas le sacrifice.
L’économiste Mohamed Jadri pointe quant à lui l’effet domino de l’inflation et des tensions sur les intrants agricoles, qui ont réduit la capacité d’élevage, en particulier chez les petits producteurs.
Un appui public encore en rodage
Pour tenter d’endiguer cette spirale, les autorités ont mis en place un plan d’appui au secteur de l’élevage doté de 6 milliards de dirhams. Objectif : reconstituer un cheptel en déclin et soulager les éleveurs. Le programme prévoit des aides à la reproduction, des subventions sur les aliments composés et un rééchelonnement des dettes agricoles.
Mais la réussite de cette politique dépendra de sa mise en œuvre. Les experts appellent à une meilleure structuration du soutien, notamment au profit des petits éleveurs, encore trop souvent laissés à l’écart. La dépendance accrue aux importations pourrait, à terme, fragiliser davantage la souveraineté alimentaire du Royaume si le redressement local tarde à se concrétiser.