Sur TikTok, des centaines de milliers de vidéos vantent les « dupes », ces copies de produits cosmétiques à prix cassés. Fond de teint, crèmes, rouges à lèvres ou solaires, rien n’échappe à la tendance. L’idée : reproduire l’effet d’un produit de marque, pour deux à trois fois moins cher. Sauf que derrière l’apparente bonne affaire, la Fédération française des entreprises de la beauté (Febea) tire la sonnette d’alarme.
À l’occasion de la Journée mondiale anti-contrefaçon, la Febea a lancé un avertissement : ces produits, très présents sur les plateformes d’e-commerce hors Union européenne comme Temu, Shein ou AliExpress, échappent à tout contrôle sanitaire. Ils sont souvent fabriqués en dehors de toute norme d’hygiène, de traçabilité ou de contrôle qualité.
Du maquillage aux excréments
Le Dr Stéphane Pirnay, toxicologue et directeur du laboratoire Expertox, prévient : ces produits peuvent contenir des substances interdites ou dangereuses. Parmi les éléments retrouvés lors de tests en laboratoire : métaux lourds, phtalates, mais aussi plumes d’oiseaux, terre, et même des excréments.
Le danger est double. D’abord chimique, avec des perturbateurs endocriniens ou des composés allergènes. Ensuite infectieux, avec des produits qui transportent germes et agents pathogènes. Quant à la qualité, elle est souvent inexistante : les produits affichent des promesses trompeuses, comme un SPF 50+ totalement fictif.
Aucune protection contre le soleil
Laurence Coiffard, professeure en pharmacie à l’université de Nantes, a analysé deux crèmes solaires contrefaites et quelques dupes vendus en ligne. Résultat : aucun ne contenait de filtres UV. « Ces produits n’offrent aucune protection contre les rayons du soleil », alerte-t-elle. « Leur utilisation expose directement au risque de cancer de la peau. »
Pour elle, ces plateformes sont devenues le repaire des faux produits cosmétiques. Leur fonctionnement leur permet d’échapper aux normes européennes, tout en inondant les marchés européens.
Un marché hors de contrôle
Une étude du Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) publiée en février confirme l’ampleur du problème : plus de 80 % des produits achetés sur Temu ne respectent pas la réglementation européenne. Dans les cosmétiques, les informations sur les ingrédients sont souvent inexactes ou absentes.
Face à l’ampleur du phénomène, les professionnels reconnaissent être dépassés. « Quand on vend à ces prix-là, il est impossible de respecter les obligations d’évaluation sanitaire », déplore Xavier Guéant, de la Febea. Avec des outils comme TikTok Shop, qui permet d’acheter directement depuis l’application, la diffusion de ces produits se fait sans filtre.
La Febea appelle à un renforcement du cadre juridique, à des moyens accrus pour les contrôles et à la clarification des zones grises juridiques. En attendant, les consommateurs sont plus que jamais appelés à la vigilance. Acheter un produit cosmétique en ligne à bas prix peut coûter bien plus cher… à la santé.