Adoptée le 22 août dernier, la loi 43-22 marque une rupture avec la logique d’incarcération systématique. Elle répond à un double objectif : réduire la pression sur des prisons saturées et permettre aux magistrats d’adapter la sanction à la réalité sociale et aux profils des prévenus.
En quelques jours, plusieurs tribunaux de première instance ont franchi le pas. Fquih Ben Salah, Kelaat Sraghna, Tanger, Tétouan, El Jadida ou encore Taroudant ont appliqué le nouveau dispositif. Au total, plus d’une cinquantaine de décisions ont été rendues, illustrant la diversité des cas et la souplesse qu’offre désormais le texte.
À Kelaat Sraghna, un condamné pour trafic d’alcool a échappé à deux mois de prison contre une amende de 200 dirhams par jour. À Fquih Ben Salah, une peine d’un an ferme pour vol a été transformée en travaux d’intérêt général. À El Jadida, un père défaillant dans le versement de la pension alimentaire a été condamné à effectuer ces mêmes travaux.
Les juridictions multiplient les exemples. À Souk El Arbaa, une peine de prison pour coups et blessures s’est muée en amende de 100 dirhams par jour. À Souk Sebt Oulad Nemma, une femme âgée a évité un mois et demi derrière les barreaux contre une amende de 200 dirhams par jour. À Khouribga, une affaire similaire a été réglée par une sanction de 300 dirhams quotidiens.
Certaines décisions vont plus loin. À Tanger, un dossier de coups et blessures mêlé à un incendie volontaire a débouché sur 1 080 heures de travaux d’intérêt général, assortis d’un suivi médical et d’un contrôle judiciaire strict. Dans une autre affaire, un MRE condamné pour abus de confiance a été assigné à domicile sous bracelet électronique.
La loi ouvre aussi la voie à des peines à caractère thérapeutique. À Taroudant, un prévenu a été contraint de suivre quatre mois de traitement contre l’addiction dans un centre spécialisé, assortis d’une interdiction de sortie nocturne et d’un contrôle bihebdomadaire à la gendarmerie.
Toutes les juridictions n’ont pas encore appliqué le texte. À Casablanca, le tribunal correctionnel d’Aïn Sebaâ n’a pour l’heure prononcé aucune peine alternative. Mais les premiers jugements démontrent que l’appareil judiciaire a pris la mesure du changement : l’incarcération n’est plus la seule issue, la sanction peut aussi rimer avec réparation, utilité sociale ou responsabilisation.