Un enseignant de droit de l’Université Ibn Zohr est en détention à Marrakech. Il est accusé d’avoir monnayé l’accès à des diplômes de master et de doctorat. Parmi les bénéficiaires présumés : des avocats, des responsables judiciaires, des fonctionnaires… Un réseau d’influence bien huilé, selon l’enquête de la Brigade nationale de la police judiciaire, déclenchée après une plainte de l’Instance nationale pour la protection des deniers publics.
L’affaire remonte à la surface des soupçons anciens. En 2018 déjà, des enseignants manifestaient contre l’imposition d’un master jugé illégal. À l’époque, aucune suite n’avait été donnée. En avril 2025, l’alerte est devenue judiciaire. Le professeur visé a été arrêté. Sa femme et son fils, tous deux avocats, sont également concernés. Leur passeport a été confisqué.
Dans les universités, l’affaire provoque l’indignation. Mais nombreux sont ceux qui refusent les amalgames. Des voix s’élèvent pour défendre un corps enseignant qui, malgré des conditions précaires, forme chaque année les cadres du pays. Sur LinkedIn, le Pr Younes Aït Hmadouch dénonce une « stigmatisation dangereuse » : « On ne peut jeter l’opprobre sur toute une profession pour les agissements d’un seul. »
L’affaire révèle un malaise plus profond. La confiance dans le système universitaire se fissure, alimentée par une impression croissante d’impunité. Les procédures de création de filières, les critères d’admission et les conditions de soutenance de thèse manquent de transparence. L’absence de vérifications indépendantes laisse place à des abus de pouvoir difficilement détectables.
L’université marocaine souffre de l’absence de vision, du manque de valorisation de la recherche, et d’un pilotage souvent opaque. Pour de nombreux étudiants et familles, elle n’incarne plus l’espoir d’ascension sociale qu’elle représentait autrefois.
L’enquête est encore en cours. De nouvelles convocations sont attendues. Les ramifications pourraient s’élargir. Ce scandale, s’il reste limité à un homme et son cercle, pourrait aussi être le révélateur d’un système vulnérable aux abus.
La question est désormais claire : l’université marocaine saisira-t-elle cette occasion pour se remettre en question ? Ou refermera-t-on une fois encore le dossier, sans réforme ni réparation ?