Des courses en apparence anodines. Mais derrière le volant, certains chauffeurs de VTC opérant dans les zones touristiques de Casablanca et Marrakech participeraient à un circuit parallèle de change de devises. C’est ce que révèle une enquête ouverte par le Bureau des changes, après la détection de flux anormaux autour de l’aéroport Mohammed V, d’hôtels et de centres touristiques.
Les soupçons portent sur une pratique bien rodée : rediriger les clients – touristes ou membres de la diaspora – vers des points de change informels. En échange, des commissions, souvent présentées comme une contrepartie à des taux plus “avantageux” que ceux des circuits officiels.
Une mécanique souterraine bien huilée
L’enquête en cours dévoile un réseau plus large que de simples chauffeurs. Des liens apparaissent avec des agences de location, des transporteurs touristiques, mais aussi des restaurateurs et cafetiers. Une chaîne informelle s’est ainsi mise en place pour capter une clientèle en quête de cash, sans laisser de trace bancaire.
Cette pratique commence à sérieusement irriter les opérateurs légaux. Plusieurs bureaux de change agréés ont déposé plainte, dénonçant une concurrence déloyale et des pertes substantielles.
Soupçons de blanchiment et de trafic
Derrière ces opérations, le Bureau des changes évoque des montants qui dépassent de loin les seuils autorisés pour les allocations touristiques. Les services de contrôle, en lien avec les douanes et les impôts indirects, suspectent un recyclage de fonds issus d’activités illicites, notamment le trafic de drogue. En injectant ces devises dans le marché noir, ces réseaux contribuent à déséquilibrer le système monétaire et à affaiblir les dispositifs de régulation.
Face à l’ampleur du phénomène, les contrôles s’intensifient. En un an, 353 missions d’audit ont été menées, dont une centaine ciblant directement les sociétés de change et les dispositifs anti-blanchiment.